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Journal d'une agrégative
8 avril 2015

Juste une pensée comme ça ... une impression d'apnée.

Il y a des moments, comme ça, où j'ai l'impression que tout est une course contre la montre.

Je regarde ces moments de ma vie où je m'y suis prise tard, où j'ai été charrette ....

Ces devoirs rendus à la dernière minute (au mieux). Ce bac révisé entre midi et deux. Cette impression d'être plus efficace en travaillant dans l'urgence. Ces rendez-vous où j'arrive systématiquement en retard.

Il ne m'a donc pas semblé étonnant de devoir m'inscrire à la maternité de mon choix à même pas un mois de grossesse. De devoir inscrire mes enfants à la crèche à 6 mois de grossesse, sans espoir d'obtenir une place. Ces délais je les ai scrupuleusement respectés.

J'ai récemment essayé des robes de mariée et en ai choisi une - 6 mois avant la date du mariage. On m'a appris que j'étais "hors délai", c'est-à-dire qu'on ne me ferait pas une robe sur mesure mais qu'on m'ajusterait une robe déjà existante. Je n'ai pas trop compris où se situait le problème, d'ailleurs. Mais j'ai trouvé fou d'être hors délai six mois avant la date fatidique ! Que dire de la tenue pour mon mariage civil, qui est en juin, et pour laquelle je n'ai que vaguement commencé les recherches ! Pourquoi ai-je tant tardé à me lancer dans les essayages ? Eh bien parce que j'ai mis du temps à retrouver un poids qui me semblait acceptable après mon accouchement. Non, soyons plus claire : j'ai mis du temps à me réapproprier mon corps après ma grossesse. Mais pour ça aussi, je suis hors délai, si j'en crois certaines photos de magazine ...

Enfin, de toute façon, je suis hors délai de fait, je me marie à 33 ans alors que j'ai déjà deux nains.

Là où ça me gène énormément c'est quand on m'impose des délais qui me semblent tôt dans le cadre du travail. On me demande en mars quels sont mes projets pour l'année suivante. Je comprends bien sûr, mais je tente péniblement de finir l'année en cours. En préparant des projets pour l'année d'après, je m'enthousiasme pour ceux-ci, et j'ai le sentiment de perdre de la motivation pour ce que je fais actuellement.
Pire, je suis régulièrement étonnée (pour ne pas dire autre chose) de voir que l'on demande sérieusement à un adolescent de 14 ans - voire à un enfant de 11 ans - ce qu'il compte faire de sa vie. A aucun moment on ne leur dit que leurs choix ne sont pas gravés dans le marbre, que des passerelles sont possibles, même si on les invente. 
Mes poils se hérissent quand je m'entends demander à un élève de 6e s'il sait ce qu'il veut faire plus tard ou quand j'entends un professeur lui dire "Mais si tu ne travailles pas dès maintenant, tu n'auras pas l'orientation que tu as choisie !" ... 
Je suis indiciblement triste. 

Je voudrais de la spontanéité, je voudrais que l'on ait le droit de se tromper, je voudrais que l'on puisse employer sa vie à se chercher. J'ai eu ce luxe : à 14 ans je voulais être maquilleuse au cinéma, ou journaliste, ou infirmière ou prof d'anglais ; à 18 ans je voulais être comédienne. Je suis devenue prof par accident et ça me plaît, je regrette parfois d'avoir commencé à travailler si tard, mais je serais bien moins épanouie, professionnellement parlant, si j'avais passé le CAPES à 24 ans.
Que dire de Monsieur mon Amoureux, dont le métier n'existait pas lorsqu'il a dû choisir son orientation ?
Que dire de mon frère, orienté de force dans une voie qui ne lui convenait pas, parce qu'il n'avait pas une façon de travailler assez scolaire ? Il se cherche encore aujourd'hui.
Que dire de cet ami qui a entrepris des études en Angleterre parce qu'en France il était considéré comme trop vieux ?

Je suis de plus en plus dégoûtée par ce souci d'efficacité, qui nous fait courir à perdre haleine - et je me demande, pour ce qui est de l'orientation en tout cas, si ce n'est pas une façon de valoriser le professeur, en oubliant que l'élève devrait se construire pour lui-même, et tant pis s'il ne trouve sa voie que longtemps après le collège ?

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Commentaires
M
C'est le sentiment que j'ai en tout cas ... Est-ce que les cases sont si rassurantes que ça ?
D
Et oui, ici on aime mettre les gens dans des cases. Pas de souplesse, pas de créativité...triste constat.
Journal d'une agrégative
  • Après 5 années, je peux enfin me présenter à l'agrégation interne. C'est parti pour quelques mois de lecture intense, de dissertations, de didactique ... Tout ça avec deux enfants à la maison. google3c5a1e83a6320d52.html Même pas peur.
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